dimanche 17 novembre 2013

Les songes sont les étymologies de nos actes.

Les songes gouvernent nos destinées. Les songes sont les étymologies de nos actes. Notre histoire est l'armorial de nos songes. Pas davantage que dans L'Ombre de Venise, dont ces Lectures constituent la suite, il n'était question de Venise, sinon de son ombre dans nos mémoires, cet ouvrage n'évoquera directement la figure historique de Frédéric II de Hohenstaufen, - à laquelle il s'adresse, dans une correspondance imaginaire, à partir d'une forteresse sicilienne: voyage dans les idées, germinatives et imprévisibles, réponse au legs ambigu de l'Empereur, en son avers historique et son envers ésotérique, - qui sont à l'origine de notre civilisation.

Depuis le songe de l'Ame du monde et de la "race d'or" de Virgile jusqu'aux approches ardentes d'Hölderlin, de Stefan George, de Fernando Pessoa ou d'Henry Montaigu, il y a, en Europe, en marge du règne des rationalistes et des planificateurs, une tradition rêveuse que Gérard de Nerval nomma surnaturaliste, qui remonte aux Orphiques, et déferle jusqu'à nous par vagues successives.

Encore faut-il, et ce sera l'objet de ces Lectures, distinguer les songes qui ne sont que ressassement, rancœur, macérations de la conscience individuelle en proie à la médiocrité des jours, et les Songes lumineux qui reçoivent l'éclat de ce suprasensible concret qui, entre le sensible et l'intelligible, déploie l'Echarpe d'Iris ! Il y a, d'une part, les songes qui éveillent, les songes orientés, et, d'autre part, les songes qui déroutent dans les dédales de la pénombre, les songes empierrés, qui nous livrent à la servitude volontaire et contre lesquels seule vaut la témérité spirituelle.

Une hypnosophie restait donc à inventer dont le Voyageur et son Ombre parcourent ici les premiers paysages dans le sillage de l'antique oniromancie, afin de séparer, comme on sépare en alchimie, "le subtil de l'épais", le songe-mensonge du songe-vérité.

Entre la mythologie et la philosophie, deux vocables grecs prédisposent à cette hypnosophie de l'Europe: Calypso et alèthéia. Calypso qui déroute le voyageur odysséen, signifie, par l'étymologie "celle qui est cachée" et alèthéia qui veut dire "vérité", se rapporte aussi, par l'étymologie, à "ce qui apparaît". Entre l'apparaître et le caché, qui sommes-nous ? C'est aux songes de nous le dire, et en musique ! aussi bien par consonance (Widerklang) que par pressentiment (Vorklang).

Par une suite d'exemple précis, ces Lectures serviront à la définition d'une poétique générale, et pour ainsi dire à une apocalypse de Calypso, c'est-à-dire à une révélation, une translucidification philosophale de ce que Dominique de Roux nommait " la conscience européenne de l'être".

Quatrième de couverture des Lectures pour Frédéric II, éditions Alexipharmaque
www.alexipharmaque.net

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire